Priant le Seigneur et Maria-sama, Teni s’assoupit. Elle se sent bien dans le temple de Dieu. Pour elle, rien ne peut lui arriver dans ce cocon bienfaiteur et bénéfique pour le corps et l’âme. Les rêves font rapidement leur apparition projetant la jeune fille dans un passé lointain, où elle était encore choyée par ses parents. Par sa mère si belle avec sa longue chevelure de geais, ses yeux océans et son sourire angélique. Cette femme d’une grande douceur apaise la fillette que d’une simple étreinte. Teni se souvient des battements de cœur réguliers de sa pauvre mère lui donnant en ce temps-là, l’impression d’être un ange l’enveloppant de ses ailes blanches et immaculées pour que rien ne lui arrive de mal. La voix de sa mère est aussi très belle et rassure Teni à chaque fois que celle-ci l’entend. Et même dans ses songes la collégienne arrive à la percevoir.
« Teni…Teni…réveille toi, tu vas attraper froid si tu dors ici ! Debout mon cœur ! »Le regard tuméfié de l’adolescente s’ouvre lentement, elle regarde la statue représentant la sainte vierge et entend dans son demi-sommeil la voix de sa mère.
« Je t’aime mon ange, maman sera toujours près de toi ! ». Tout en se redressant brusquement, la jeune fille tend la main en direction de la statue et pleure en suppliant sa mère de ne pas la laissé seule…mais le doux rêve prend fin et ramène Teni une réalité bien triste et si amère pour une adolescente de quinze ans.
Tout en se frottant les yeux, la jeune fille se rend compte qu’il ne s’agissait que d’un rêve ou peut-être comme le dirait son psy d’un désir inconscient de revivre cette époque de bonheur. Reprenant lentement ses esprits, elle lève son superbe regard noisette en direction d’un vitrail. Il fait nuit ! Combien de temps est-elle restée endormie ? Teni s’interroge. Elle s’agenouille devant la statue de la vierge Marie est s’excuse de s’être laissé aller de la sorte, mais son regard remarque un mouvement dans les allées de l’église. Quelque chose bouge rapidement, se déplaçant avec grâce et rapidité. Curieuse, la collégienne se lève et descend les marches lentement. Elle tente de percevoir dans les ténèbres le moindre mouvement. Teni cherche, mais ne voit rien et n’entend rien d’autre qu’un bruit très léger. Immobile, elle écoute et le bruit cesse.
N'aimant que peu les ténèbres et, inquiète de cette présence invisible, la jeune fille retourne vers l'autel. Sous ce dernier se trouve une petite trappe, qu'elle ouvre sans difficulté. Comme prévue, elle y trouve une boite d'allumettes et pour combattre la pénombre, elle allume les bougies entourant l'autel. Elle ne perçoit plus le moindre bruit et pense avoir rêvé. Après tout, elle venait juste de s'éveiller et son inconscient l'aura induite en erreur. Elle s’assoit sur les marches et observe le corps de la lycéenne un sourire sur le visage. Elle semble en paix se dit en elle-même l’adolescente satisfaite d’avoir rendu service à une amie.
Un mouvement dans le dos de Teni l’a fait réagir. Se retournant brusquement, elle aperçoit la forme noire qui d’un bond atterrit sur ses genoux. Le cœur de la collégienne manque d’exploser. Et elle entend le ronronnement du chat venant de lui faire une peur de tous les diables.
« Idiot ! » lança Teni avant de sourire en caressant le chat entre les oreilles. L’animal a l’air content et après de longues minutes, il quitte les genoux de Teni qui le suit du regard. Elle voit l’animal fasse à une porte adjacente et devant cette dernière il miaule avec insistance. Que veut-il se demanda la collégienne. S’agit-il du chat du prêtre de la paroisse ? Ne cherchant pas plus avant, la jeune fille se lève et une fois devant la porte, elle tourne la clenche. Timidement, elle ouvre la porte qui grince de manière inquiétante. Sans demander son reste, le chat pénètre dans la pièce et disparait à la vue de l’adolescente qui le suit, ayant pris soin d’allumer la lumière.
Elle est dans le bureau du prêtre. Teni en est certaine en voyant les deux fauteuils anciens en velours rouge et le bureau en chêne. Certaine d’être seule en ce lieu, elle passe la main sur le surface plane en marbre du bureau, puis inspecte les tiroirs un par un. Dans le dernier tiroir, elle y découvre un superbe rosaire qu’elle glisse dans sa poche. Bien qu’elle ne sache pas vraiment tout des évènements s’étant produit peu avant, elle est certaine que le rosaire lui portera bonheur. Ne trouvant guère plus, Teni poursuit tranquillement sa visite des lieux. Elle passe une fine tenture séparant le bureau d’une autre pièce. Elle est maintenant dans la cuisine et se souvient n’ayant plus mangé depuis midi. Elle ouvre le frigo et y trouve une boite de lait ainsi que quelques petites choses à grignoté. Tout en buvant un verre de lait, elle remarque qu’une porte se trouvant au fond de la cuisine est entrouverte. Le chat en déboule les poils hérissés sur le dos et Teni l’observe en terminant son verre, qu’elle dépose ensuite dans l’évier tout proche.
Curieuse de connaitre ce qui a effrayé le chat, elle s’approche de la porte entrouverte d’où se dégage une étrange odeur de pourriture. Elle passe un doigt sous son nez et avance doucement et pousse finalement la porte. Un homme est à genoux et au vu des bruits, il mange quelque chose. Pour mieux comprendre ce qui se passe, la collégienne allume la lumière et observe un spectacle horrible. L’homme est penché sur un corps couvert de sang et il semble lui-même avoir les mains remplies de liquide noirâtre. Que fabrique-t-il se demande intérieurement Teni qui recule instinctivement. Au même moment le visage de l’homme se tourne vers elle. Il semble décharné et ses lèvres sont recouvertes de sang. Sur le moment, fermant les yeux, la collégienne pense qu’elle est encore sous l’emprise d’une vision, mais les ré ouvrant rapidement, elle voit la créature venir vers elle.
Il ressemble à un pantin désarticulé poussant des sons étranglés. Il avance lentement vers elle en trainant la jambe où apparait une trace de morsure. Tout en reculant, la jeune fille remarque la collerette blanche et comprend enfin que cette chose et le prêtre qu’elle aimait tant. Elle observe immobile la créature venir vers elle. Si vraiment cette horreur est le prêtre de cette église, il est évident pour Teni qu’elle est sous l’emprise d’une de ses crises. Elle tente de combattre la terreur qui la gagne lentement en repensant aux conseils de son psychiatre.
« Mon père ? »Bien que mettant en pratique ce qu’on lui avait enseigné à l’hôpital, la vision ne semble pas vouloir prendre fin. Réagissant de justesse, la collégienne échappe à l’étreinte mortelle et part en courant en direction de l’église. Sans hésitation, elle ramasse son arc se trouvant au pied de l’autel et attend. L’homme ne tarde pas à apparaitre dans l’embrasure de la porte continuant a avancé lentement vers l’adolescente qui bande maintenant son arc. Cette fois, elle en est certaine, elle ne fait pas un cauchemar. Cette chose est bel et bien réelle. Cette créature lui veut du mal et ceci Teni ne peut le concevoir. Personne ne lui fera jamais plus de mal ou il en payera le prix de sa vie. Tout en prononçant des prières, la collégienne tend la corde de l’arc et la relâche aussi sec. Le projectile fend l’air et se loge dans le torse de celui qui fut prêtre. Au moment de l’impact, Teni sourit, un sourire froid est sans pitié. Elle sait maintenant que la vierge Marie lui a confié une mission. Elle doit purifier le monde et elle le fera pour le bien de tous.
Le sourire de la collégienne disparait rapidement. Le prêtre est toujours debout et poursuit lentement ça marche. Ne comprenant pas comment, il peut encore être debout, la jeune fille décoche une seconde flèche qui se loge près de la première. Écarquillant les yeux, Teni est abasourdie, le prêtre est toujours debout ! Elle secoue la tête de gauche à droite et lance un bref regard au corps sans vie de la lycéenne. Puis, elle reporte son attention sur l’homme se rapprochant dangereusement. Reculant de quelques pas, elle s’adresse à lui un air sadique sur le visage.
« Pourquoi refuses-tu de mourir. POURQUOI…POURQUOI…POUQUOI ! Toi qui es prêtre, tu devrais être aux anges de rejoindre le seigneur. Alors, maintenant, tu vas être mignon et mourir bien sagement…hein ! Tu veux bien ? ».Éclatant de rire, l’adolescente bande de nouveau son arc et cette fois, elle vise la tête de l’homme toujours silencieux en dehors de quelques sons ressemblant à une respiration entremêlée de râle. Relâchant la corde, la troisième flèche se fige dans un craquement sinistre dans le crane de l’homme qui s’effondre enfin sur le sol dans un bruit mat. N’arrêtant pas de rire, la jeune fille observe le corps du prêtre parcourut de spasme. Passant la main libre dans sa longue crinière, Teni s’empare d’un chandelier et tout en l’écrasant sur le crane de l’infortuné, elle s’adresse une dernière fois à celui qui la conseilla tant de fois par le passé.
« Tu vois quand tu veux. Maintenant, tu vas connaitre la quiétude auprès de notre seigneur. J'espère que tu seras heureux aux côtés des anges et archanges. Non, non, ne me remercie pas, j'ai été très heureuse de t'aider...Quoi ? Bien entendu, je prierais pour toi, ai confiance en moi ! ».
Tout en abattant le chandelier encore et encore des larmes inondèrent son visage. L'adrénaline retomba comme elle était venue et elle lâcha finalement le chandelier qui roula sur le sol. Las, la collégienne tomba à genoux. Se tenant le visage à deux mains, elle passa de crise de rire à crise de larmes en une fraction de seconde. Au bout d’un long moment et ayant reprit ses esprits, Teni ramasse l’étui à guitare et le jette sur son épaule, puis elle prit son arc en main droite et fit une brève vérification des flèches se trouvant encore dans le carquois. Il lui faudra des flèches supplémentaires pensa t’elle. Certaine de n’avoir rien oublié, elle traversa rapidement le presbytère et s’engage dans une ruelle se trouvant derrière l’église. Un calme inquiétant régnait en maitre sur la ville. Profitant de cette accalmie, l’adolescente pressa le pas, consciente qu’elle devait avant tout rejoindre l’hôpital pour y prendre quelques affaires de rechange, puis elle se mettrait à la recherche d’un arc plus performant.